jeudi 30 août 2007

Journal d'un ancien globe-trotter - Suite 4

Saint Denis, le 5 janvier 2005

Hier, j’ai pas écrit une ligne… Je suis rentré trop tard, je me suis couché tout de suite… En fait, j’étais rentré comme d’habitude, mais je suis ressorti presque aussitôt. Trop le cafard… Clémence ne m’appelle plus du tout. Elle ne répond pas non plus aux messages que je lui laisse sur sa boîte vocale… Pourtant, elle les trouve forcément… Pourquoi n’y donne-t-elle pas suite ? J’angoisse un maximum ! En y repensant plus à fond, je me souviens qu’avant son départ, je l’avais trouvée un peu bizarre, pas vraiment comme d’habitude… Je n’y avais pas trop prêté attention sur le coup, j’avais mis ça sur le compte de la fatigue. Mais maintenant, je me demande s’il n’y a pas autre chose… C’est pour ça que je suis ressorti, pour me changer les idées. Je suis allé retrouver un collègue redevenu célibataire, et qui dîne tous les soirs dans le même resto. On a mangé ensemble au Palais de l’Orient ; mon copain aime la bouffe asiatique et moi aussi de temps en temps. Ensuite, on a terminé la soirée sur le Barachois, dans le bistrot à la mode, « Le Roland Garros », face à l’océan indien. Bien sûr, on a pas mal bu… Lui, pour oublier que sa femme s’est barrée définitivement en France il y a six semaines, et moi, pour essayer de me rassurer en pensant que la mienne allait me revenir dans une quinzaine. Forcément, on s’est beaucoup faits draguer… Deux mecs seuls, « métros » ou « z’oreilles », ça se remarque ! Les Réunionnaises, surtout les créoles bronzées, nous apprécient tout particulièrement… Si on avait voulu… Mais on n’avait pas la tête à ça, vraiment pas !
Arnaud et moi, on a plutôt l’alcool triste. Il n’en finissait pas de me raconter pour la énième fois, l’histoire de son couple… C’est justement parce qu’il avait eu un soir une petite défaillance avec une jeune et belle cafrine, que son épouse l’ayant appris avait fait immédiatement sa valise sans attendre d’explications. Eméché, il ne cessait de me répéter, me montrant la table d’en face où jacassaient en riant trois jolies filles métissées qui nous lorgnaient effrontément, l’œil brillant de convoitise : « Tu les vois, ces trois-là, hein ? Ces petites salopes n’ont pas froid aux yeux, elles nous draguent carrément ! C’est exactement comme ça que ça m’est arrivé… Moi, j’ai rien fait. Tu le sais bien, toi, Alexandre, que je suis pas un homme à femmes… C’est elle qui s’est jetée dans mes bras ! Je comprenais pas du tout ce qui m’arrivait… Sauf qu’une vraie bombe de bimbo exotique s’offrait tout à coup à moi… J’ai perdu la tête… T’aurais pu résister, toi ? Moi, j’ai pas pu ! Je suis sûr que peu de mecs auraient pu… J’ai eu beau essayer d’expliquer la chose à Marine, elle a rien voulu savoir ! Et pour une connerie passagère, me voilà maintenant comme un con ! Tu me diras qu’à présent, j’ai le champ libre… D’ailleurs, si Marine ne revient pas, c’est peut-être ce que je finirai par faire… Mais pour l’instant, ça m’en a coupé l’envie… ». Comme il commençait à avoir la larme à l’œil j’essayais de le consoler, lui affirmant que venir sur les îles tropicales représentait justement un danger de ce côté-là pour beaucoup de couples ; et qu’on en voyait d’ailleurs pas mal qui se brisaient, parce que le mari, tout comme lui, Arnaud, n’avait pu résister à l’appel de trop belles sirènes bien bronzées. Mais j’étais mauvais dans le rôle, j’étais moi-même trop soucieux… Et puis, je me rendais compte également que je commençais à avoir des difficultés à parler. Il était temps que je rentre, si je ne voulais pas ensuite me heurter à tout ce que je rencontrerais sur le trottoir… J’ai donc entraîné mon copain dans le même état que moi, et nous sommes sortis assez dignement, sous le regard extrêmement déçu et frustré des demoiselles créoles. Après une accolade, Arnaud et moi sommes partis chacun de son côté. Heureusement qu’on était à pied et qu’on n’habitait pas trop loin du bistrot ! C’est bien d’ailleurs pourquoi on se permettait de boire autant…


A suivre...

JUSTINE MERIEAU - ECRIVAIN

Blog destiné à faire connaître mes livres, romans et nouvelles. J'y présente des extraits de ceux-ci, avec également quelques inédits. Mais on y trouvera aussi mes humeurs littéraires du moment...
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Saint-Joseph, 97480, Réunion
Ecrivain nantais, je suis romancière et nouvelliste. Je demeure à La Réunion depuis 1987.